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Paru dans Pirates Magazine n°6
2000-01-02 00:00

Créez votre entreprise (presque) sans argent


Partie 2 : paradis fiscaux et offshore



Les paradis fiscaux présentent souvent l'intérêt d'être très bien situés géographiquement. Au soleil ! Mais attention, il ne s'agit pas d'ouvrir une boutique de maillots de bain ou autres masques de plongée. On raisonne ici en termes de « société offshore », société établie dans un pays dans lequel elle n'exerce aucun commerce et dont les dirigeants n'y sont pas forcément domiciliés.

Le rêve américain
Parmi les 80 paradis fiscaux dénombrés, le Delaware se dégage du lot. C'est un Etat de l'est des Etats-Unis, entre Washington et New York. Malgré sa petite superficie de près de 5 000 km2 et seulement 650 000 habitants, il est la capitale mondiale des sociétés : on y compte pas moins de 200 000 sociétés et la moitié des sociétés cotées à Wall Street y sont domiciliées ! Il faut dire que la liste des avantages est impressionnante. Il ne faut que quelques heures pour constituer une société, il n'y a pas de capital minimal, ni d'obligation de fournir de renseignements sur le nombre d'actionnaires. D'ailleurs, un seul actionnaire peut suffire et il peut parfaitement être étranger.
Les chiffres vous ennuient ? Justement, le Delaware est fait pour vous : il n'est pas obligatoire de tenir une comptabilité, toujours trop fastidieuse ! Mais cela est tout de même plus que conseillé... Il est seulement nécessaire d'avoir dans cet Etat, son siège social et un représentant local à la même adresse. Généralement, c'est le bureau de ce mandataire qui servira de siège social. Les seules interdictions sont assez limitées : vous ne pouvez commercer ni avec le Delaware, ni avec le reste des Etats-Unis sous peine de devoir reverser un impôt de 20 %. Parce qu'il s'agit d'un Etat fort respectable, vous ne pouvez pas davantage effectuer des trafics peu reluisants (armes, drogues, etc.) ou trop risqués pour les tiers (banque, assurance). Désolé ! Mais si vous respectez ces quelques limites, le régime fiscal fait alors rêver puisqu'il n'y pas d'impôt sur les sociétés dont l'activité se situe hors du territoire. Ainsi, vous pourrez développer une société de conseils, de création de site Internet par exemple, dont le marché se situe en France. Il ne vous sera exigé là-bas qu'une taxe spéciale annuelle sur le capital social. Mais cette taxe est très peu élevée. Elle sera au maximum de 700 F (106 euros) par an ! Et si vous êtes actionnaire, payé en dividendes, et non salarié de votre société, il n'y a pas de charges sociales...

Profession : intermédiaire ou arnaqueur
Chic sur votre carte de visite, monter sa société outre-Atlantique n'est pas difficile. Vous avez d'abord le choix entres plusieurs structures : la close corporation, petite structure d'une à trente personnes. La general corporation qui permet de regrouper des personnes morales et plus de trente actionnaires. Il s'agit d'une structure plus importante, qui permet d'inclure dans le capital des biens assez hétéroclites (avion, bateau, voiture, etc.). La limited liability company qui est l'équivalent de la Sarl française et offre donc une responsabilité limitée. Enfin, la S corporation offre l'avantage délectable d'offrir à ses propriétaires, la possibilité de défalquer les pertes de leurs impôts personnels !
Pour créer votre société, il vous faut passer par l'intermédiaire d'un professionnel qui vous adressera les documents à remplir et à lui renvoyer. Ces documents concernent simplement le type de société choisi, son nom, son objet social et son capital éventuel. Ce professionnel sera le plus souvent un cabinet d'avocats qui effectuera les démarches à votre place. Comptez 1.500 dollars en moyenne. On trouve de nombreux professionnels qui offrent des prestations équivalentes. Certains ont des agents en France. Mais méfiez-vous néanmoins des escrocs en tout genre qui vous feront miroiter mille et une choses, puis s'envoleront avec votre argent, une fois les premiers versements effectués ! (Lire notre enquête exclusive dans Virus 13.)

Interdit bancaire ? Pfff !
Bien que vous ne soyez pas tenu d'ouvrir un compte bancaire, il est encore très smart de détenir une carte de crédit et un chéquier auprès d'une banque de cette contrée décidément fort attirante. Imaginez la tête de vos amis ! Vous pouvez ouvrir un tel compte sans difficulté, la seule exigence est un dépôt minimal de 500 dollars. Un compte négatif depuis plusieurs années ? Pas grave. Interdit bancaire ? Aucune importance. Les banques de là-bas n'ont aucun contact avec les banques d'ici sur ces questions qu'elles jugent bien accessoires. De même, si les comptes ne sont pas anonymes, ils bénéficient du secret bancaire, secret qu'il est toujours difficile de lever (sauf en cas de blanchiment de l'argent de la drogue).
Si l'anonymat est votre souhait le plus profond, sachez aussi que le nom des associés n'est pas publié dans un registre public, contrairement à la France. Pour faire bonne mesure, la législation delawarienne n'oblige nullement les generals corporations à fournir leurs comptes au Trésor américain ou à les publier. Vous avez aussi la possibilité d'ouvrir un compte en France au nom de la société américaine. L'intérêt sera grand pour vos clients qui auront l'impression de s'adresser à une boîte bien implantée et proche d'eux. Mais, toujours dans ce souci de discrétion, vous pouvez aussi préférer un compte au Luxembourg ou en Suisse, plutôt que dans l'hexagone. Le secret y est un véritable culte.

Faites des petits !
Après émission de deux ou trois fax, vous pouvez donc créer votre société sagement assis sur un confortable canapé, Pirates Mag' dans les mains ! Vous pouvez aussi mener vos affaires d'une manière plus poussée, en travaillant en France. Selon quelle forme ? Nous le verrons plus bas, être salarié d'une société étrangère n'apporte aucun avantage. Il y a beaucoup mieux : vous pouvez créer un bureau de liaison qui est une simple adresse commerciale sur le territoire. Cela rassurera vos clients français et c'est d'autant plus intéressant qu'aucune immatriculation commerciale n'est nécessaire pour ce genre de structure. Vous pouvez également envisager de monter une Sarl à capital variable (montant : 5.000 F, soit 762 euros, lire précédent numéro) et profiter des nombreux avantages nationaux (aides, réductions, subventions et autres coups de pouce appréciables). Accessoirement, vous pourrez passer des contrats avec votre société implantée à l'étranger. Plus ils seront gros, plus votre imposition française sera légère... voir nulle ! Et inversement, de l'autre côté de l'Atlantique, ce petit montage ne changera rien, puisqu'il n'y a pas d'impôt sur les sociétés !

Le fisc aux aguets
L'administration fiscale française voit cependant d'un très mauvais œil ce genre d'acrobaties. Prenons un exemple : vous avez une société en France. Vous créez une société au Delaware et passez des contrats avec cette dernière, en prenant le soin tout particulier de gonfler ses bénéfices. Une sorte de masochisme financier. Vous lui achetez ainsi un site Internet à un prix d'or, ou lui commandez une étude sur le volume moyen du taux de benzène dans l'air dans les cinquante prochaines années. Si l'administration parvient à démontrer cette entourloupette, il y aura « présomption de transfert indirect de bénéfices » (article 57 du Code général des impôts) : votre bénéfice sera automatiquement rehaussé du montant de l'avantage injustifié consenti à votre société étrangère.
Mais cette présomption pourra être combattue si vous démontrez que le prétendu avantage dénoncé par nos amis du fisc, est parfaitement justifié et est conforme à son intérêt : la société du Delaware connaît des difficultés passagères, elle est nouvelle sur le marché extérieur, la concurrence est vive sur votre créneau, etc. Théoriquement, l'administration devra prouver d'une part que la société française a consenti à son partenaire étranger un avantage commercial et, d'autre part, qu'il existe un lien de dépendance de droit ou de fait entre les deux sociétés. Mais elle sera dispensée de cette dernière exigence si elle démontre que le Delaware est un paradis fiscal ou, dans le jargon, un « pays à fiscalité privilégiée ». Ce qui semble pour le moins aisé à faire. Pour votre information, sachez qu'un pays est considéré paradis fiscal à partir du moment où l'impôt y est inférieur de deux tiers à celui qui s'appliquerait en France.
Il ne servira donc à rien de prétexter que la société étrangère ne présente aucun lien avec votre société : n'oubliez pas que cette preuve est impossible à apporter puisque le nom des véritables propriétaires peut être tenu secret.
De plus, le fisc peut également dégainer les articles 123 bis, 209 B et 238 A du Code général des impôts, particulièrement adaptés aux paradis fiscaux... Encore des soucis en perspective !

L'abus de droit
Parallèlement à l'article 57 du Code, une autre arme favorite de l'administration fiscale est la procédure dite de « l'abus de droit ». Par cette technique, l'administration se réserve le droit de requalifier un montage financier et de lui redonner sa nature réelle. Les conséquences s'apparentent à un cataclysme : l'abus de droit est sanctionné par une majoration de 80 % des impôts éludés avec en prime un intérêt de retard de 0,75 % par mois. Elle sort, à coup sûr, cette arme dès lors que le montage a été effectué dans le seul but d'éviter le paiement de l'impôt. Mais, pour que le coup de feu parte, elle doit démontrer, cette fois, qu'il y a eu effectivement une telle motivation. Etablir sa société dans un paradis fiscal est donc risqué. Et, à cela, on peut rétorquer. D'une part, il ne vous est jamais interdit de faire preuve d'habileté fiscale et de préparer toute une argumentation démontrant qu'il y va de l'intérêt de votre société de s'établir au Delaware. D'autre part, il faudra bien du courage à l'administration pour démontrer que telle société située dans cet Etat vous appartient !

Delawarez.com
On peut donc parfaitement envisager d'y monter une société de services s'adressant au marché international, compte tenu de la proximité de cet Etat avec les grandes places techniques et financières américaines. Quels services ? Tous les services qui ne vous obligent pas à prendre l'avion à chaque prestation ! Des développements de logiciels, des agences matrimoniales, du télésecrétariat, etc. Une précision importante : si vous comptez agir, prospecter, attaquer en France, vous aurez, en principe, à payer l'impôt sur les sociétés pour « les bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France » (art. 209-I du Code général des impôts).
Ce critère ne brillant pas par sa précision, les juridictions en ont précisé le sens. Pour les tribunaux, il y aura application de la fiscalité française lorsque vous y exploiterez un établissement tel qu'une succursale, par exemple. Les effets seront identiques si vous avez en France un représentant agissant pour le compte de votre société ou, enfin, si cette dernière effectue un « cycle complet d'opération commerciale » dans l'hexagone. Echapper, illégalement, à l'impôt sur les sociétés reste donc assez facile. Comment ? Par la mise en place d'un bureau de liaison qui ne sera qu'une boîte aux lettres et une vitrine des produits pour les clients français. Ou, bien mieux, en ouvrant un commerce virtuel sur le Web à partir d'une exploitation au Delaware, sans représentant en France.

La cerise sur le gâteau
Créer une société au Delaware, donc aux Etats-Unis, n'offre pas seulement des gâteries fiscales. Cette création vous ouvre droit à l'obtention d'un visa pour y séjourner et travailler temporairement pour le compte de votre boîte. Le service américain de l'immigration n'exige qu'un contrat de travail. Etant directeur et unique actionnaire de votre propre société, il est inutile de souligner que cette condition ne sera pas des plus complexes. Deux années au Delaware suffiront à vous offrir la possibilité de demander la nationalité américaine. Pour le visa permanent, le fait d'être directeur d'une société vous placera d'office dans l'une des catégories privilégiées pour son obtention (40.000 visas chaque année). Notez toutefois que les services américains peuvent toujours vous refuser l'octroi de la nationalité, même si vous remplissez toutes les conditions.
Enfin, l'introduction à la bourse de Paris est toujours longue, compliquée et coûteuse. Tandis qu'une société du Delaware entrera sans problème à celle de New York. Et une fois la société cotée là-bas, ce ne sera plus qu'une formalité de revenir en France...

Paradis imaginaire ?
La difficulté principale est évidemment le sort des bénéfices engrangés dans cet éden. Le principe est que si un contribuable est résident en France, il est assujetti sur ses revenus mondiaux. Que vous soyez salarié ou actionnaire unique de votre société, ces sommes, que l'on espère rondelettes, seront taxées à l'impôt sur le revenu en France. Evidemment, vous pouvez faire encaisser ces sommes sur un compte au Luxembourg, utilisable en France en toute discrétion avec une carte de crédit. L'opération peut rester ainsi secrète jusqu'au bout... à vos risques et périls. Outre le redressement et les pénalités, vous pouvez écoper de lourdes amendes, voire de prison ! Il faut savoir également que le fisc pourra vous redresser à partir, non de vos revenus, mais de votre train de vie. Il n'est jamais de bon ton d'avoir un salaire « normal » et de rouler dans une voiture de sport... Mais, en fait, vous n'aimez pas les Etats-Unis ? D'autres pays, dont la France, sont de vrais paradis.
(A suivre !)

1, 2, 3, partez !

Une autre méthode, bien plus radicale pour ne plus payer d'impôts en France, est de devenir non-résident français. Là, il ne s'agit plus d'investir à l'étranger, mais de s'y établir. Seulement, le fisc est coriace et ne vous laissera pas vous échapper aussi aisément. Juridiquement, quatre conditions cumulatives sont exigées pour devenir non-résident : il ne faut plus avoir son foyer familial en France. De même, il ne faut pas y avoir son lieu de séjour principal, c'est-à-dire y résider plus de six mois par an. Ni, enfin, y avoir son activité professionnelle principale, ni son centre d'intérêts économiques.
Si l'on passe à la pratique, vous ne payerez plus d'impôt si vous logez à l'étranger avec conjoint et enfants, vous résidez en France moins de six mois par an, et si vous travaillez et gérer vos affaires depuis l'étranger. En gros, devenez touriste français en France ! Attention aux fausses expatriations, le fisc dispose d'une multitude de moyens pour vous coincer : témoignages du voisinage, analyse des factures d'électricité, d'eau et de téléphone, etc. Il est judicieux de garder un maximum de traces de dépenses à l'étranger, ses billets d'avion, etc.
Chaque année, 30 000 contribuables quittent le pays. Sachez qu'une déclaration de départ est quasi systématiquement suivie d'un contrôle fiscal.

Exemple de tarifs

Une société spécialisée dans ce domaine offre, clef en main, sur l'internet, la possibilité de se constituer une petite affaire avec quelques milliers de francs : domiciliation commerciale au Delaware (7.000 F, soit 1.060 euros), services téléphonie et mail (400 F, soit 60 euros/mois) et compte bancaire au Luxembourg (2.500 F, soit 380 euros). Les frais de constitution sont souvent offerts. A comparer aux 50.000 F (7.620 euros) nécessaires (rien que pour le capital) en France !
Vous trouverez des contacts et des exemples de statuts, en français et en anglais, pour 500 F (76 euros) auprès de notre confrère Job pratique. Mais avez-vous suffisamment confiance dans les Etats-Unis ? Ne serait-il pas judicieux de choisir un autre pays ? A suivre...

Votre banquier est une balance

Lorsque vous sortez de l'argent de France, l'Etat se montre curieux. Si vous exportez dans votre valise des chèques de voyages ou des espèces, ceux-ci doivent être déclarés aux douanes si leur montant dépassent 50.000 F (7.620 euros). Mais on reste quand même loin des prix de constitution d'une société par un prestataire spécialisé, capital compris ! Et puis, il est toujours possible de passer plusieurs fois 49.999 F... Attention, puisque vous partez à l'étranger, vous avez sans doute des devises sur vous, or elles comptent dans le total !
Si vous sortez ce montant du pays par chèque ou par virement, c'est votre banque qui avertira les autorités. A ce qu'il paraît, dans le but de lutter contre le blanchiment de l'argent... Enfin, si vous souhaitez investir à distance, vous devez effectuer un compte rendu obligatoire auprès de la Banque de France dès que le montant de l'investissement dépasse 5 millions de francs (762 milliers d'euros).
Pour échapper à cela, il existe une astuce (illégale) : la compensation. Il suffit de trouver une personne qui souhaite passer de l'argent dans le sens inverse et échanger les sommes correspondantes auprès d'un intermédiaire de confiance dans chacun des deux pays.
A lire aussi : Échapper aux impôts : la théorie du « voyageur permanent »
Marc Rees

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