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Paru dans Le Virus Informatique n°47
2021-04-14 00:02

Édito : Voyage au pays des pillards de tombes des ordinosaures



Le dossier que nous consacrons au micro-ordinateur français Squale des années 1980 (dont nous avons révélé la surprenante histoire dans Virus Info 46) nous a valu un important courrier de lectrices et de lecteurs qui l’ont particulièrement apprécié. Une surprise pour nous, car nous pensions ce sujet trop spécifique. Par manque de place dans le magazine, nous n’avions pas pu raconter les singulières coulisses de notre enquête ; occasion d’un coup de gueule plus général.

Cette enquête représente des centaines d’heures de travail étalées sur une vingtaine d’années. Nous avons reçu l’aide spontanée de nombreux autres passionnés comme nous de vieux ordinateurs (aussi affectueusement appelés « ordinosaures » ou « sasfépus »), qui nous ont remonté spontanément des informations sur l’ordinateur dès qu’ils en voyaient passer, afin de reconstituer le puzzle. Nous pensions toute cette communauté animée par un même esprit constructif de sauvegarde d’un pan de l’histoire informatique avant qu’il ne sombre dans l’oubli définitivement (c’est triste, certains acteurs sont déjà décédés). Malheureusement, nous avons aussi croisé quelques personnes du même milieu bien plus désagréables, voire malveillantes.
En général, nous voyons plutôt ce genre de comportements lorsque nous enquêtons sur un dossier sensible, par exemple une société arnaquant ses clients ou qui souffre d’une faille de sécurité, et qui ne veut surtout pas que nous publiions l’article. Nous ne nous attendions pas à cela cette fois.

Outre les insultes publiques comme « mongoliens » reçues dans un premier temps pour avoir affirmé que le Squale a été commercialisé à l’époque (tous les spécialistes prétendaient le contraire), nous avons été pris pour cible à nouveau lorsque nous en avons déniché un exemplaire, au motif que nous l’aurions acheté « pour spéculer ». Il se trouve que certaines personnes ont exigé que nous leur fassions don de la machine (avec port offert aussi), puis ont affiché une agressivité qui n’a jamais cessé depuis notre refus. Refus, car nous avons racheté l’ensemble pour nos travaux de recherche « historique » (voire de portages de logiciels maison, une fois qu’il sera remis en état) ; il est prévu qu’il finisse cédé gracieusement à un musée.

Contrefaçons et manque de respect
En fonction des contraintes logistiques, nous pouvons partager la documentation et les fichiers associés (voire nous avons prêté la machine elle-même) avec des experts, à condition qu’ils s’engagent à ne pas diffuser publiquement ce qui serait couvert par le droit d’auteur avant que les ayants droit ne soient retrouvés et acceptent une diffusion à plus large échelle (nous travaillons depuis des années dans ce but, toute aide est bienvenue pour aller plus vite ; à ce jour, il y a déjà assez pour concevoir des émulateurs 100 % légaux). Par respect envers ces auteurs, mais aussi par respect de la loi (en France, une œuvre ne tombe dans le domaine public que 70 ans après la mort de son auteur). Logiquement, le Musée des Arts et Métiers n’a pas non plus autorisé que le logiciel « dumpé » grâce à lui sur son exemplaire de Squale ne soit diffusé publiquement, afin de ne pas se retrouver accusé d’être complice de contrefaçon.

Malgré la loi, certaines personnes estiment pouvoir se passer de ces autorisations. Loin d’en rester à une simple divergence d’opinions, quelques-unes (notamment celles qui voulaient que l’exemplaire de Squale leur soit offert…) se sont lancées dans des nombreuses insultes et calomnies diverses à notre égard (« escroc », « putain de requin », etc.). À force, on est blindé. Mais plus choquant : les ayant droits eux-mêmes ont été pris pour cible de manière générale. En effet, de prétendus passionnés de vieux ordinateurs vont jusqu’à expliquer que les témoignages historiques des personnes qui ont conçu ces machines de l’époque et leur environnent logiciel n’ont aucune importance, seuls comptent les matériels et les logiciels eux-mêmes. Quoique ces machines, le Squale par exemple, peuvent être également qualifiées de « bouse » (qui « n’a jamais été commercialisée » malgré les déclarations contraires de ses géniteurs !).

Un esprit de partage limité
En fait, ces personnes « existent » en partie grâce aux diffusions de contrefaçons de produits de l’époque qu’elles font sur leurs sites Web, car c’est un moyen d’y attirer des visiteurs. Des compilations massives au-delà du Squale et comme il y a en a beaucoup dans le monde des vieux ordinateurs et vieux jeux vidéo, en se réfugiant derrière l’excuse de la « sauvegarde du patrimoine ». Encore une fois (lire Virus Info 45), il existe pourtant, dans ce domaine, des initiatives plus officielles, légales et sérieuses de la part de musées, bibliothèques nationales, etc. Conserver (en respectant les normes techniques pour éviter la détérioration) est une chose, diffuser sans autorisation en est une autre.
D’autant qu’ici l’esprit de partage a ses limites, puisque – passons outre les personnes qui ne diffusent rien de leur travail à elles – l’une vend des logiciels de son cru (au lieu de les offrir), une autre diffuse gratuitement ses quelques créations, mais sans leurs codes source (histoire de cacher ses « secrets de fabrication » ; on n’ose imaginer de la repompe de code…) empêchant ainsi le portage vers d’autres systèmes d’exploitation pour d’autres utilisateurs, notamment ceux du futur… Gênant pour de la conservation du patrimoine, n’est-il pas ?

Comble de l’ironie lorsqu’une de ces personnes fermement opposées aux droits d’auteur d’autrui déclare : « On vient de me prévenir qu’un webmaster pour le moins indélicat, et j’emploie ce terme pour rester poli, a utilisé quelques-unes de mes photos pour réaliser son site Web. En regardant de plus près, il a tout simplement pillé plusieurs sites que j’ai pu reconnaître, photos, mais aussi texte, symboles… » ou qu’une autre, échaudée, ajoute sur son site Web une mention du type « toute utilisation, reproduction, diffusion, commercialisation, modification de toute ou partie du site, sans l’autorisation [du propriétaire de ce site] est prohibée et pourra entraîner des actions et poursuites judiciaires telles que notamment prévues par le code de la propriété intellectuelle et/ou le code civil. »



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